Paris-Roubaix Challenge : 145 km pour vibrer sur les routes du nord
Chez Mercier, on aime penser que ce ne sont pas seulement les performances qui marquent, mais les histoires que l'on vit en chemin. Les routes qui secouent, les kilomètres partagés, les doutes, les sourires. Le Paris-Roubaix Challenge, c’est un peu tout ça à la fois. Une épreuve mythique, rendue accessible aux amateurs, où l’on vient surtout chercher l’expérience, le bruit sourd des pavés, l’émotion d’un passage dans la Trouée d’Arenberg, et la bière bien méritée du Vélodrome.
C’est également trois formats : 70, 145 et 170 kilomètres. Et une même envie : toucher du bout des doigts un morceau de légende.
Parmi les milliers de cyclistes présents cette année, Jérôme Kus faisait partie de ceux qui avaient coché la date bien à l’avance. Passionné de longue date, habitué des longues distances et fidèle à l’esprit de l’effort, il a roulé sur les pavés de l’enfer du Nord avec ce mélange de lucidité, d’humilité et de joie tranquille qu’on retrouve souvent chez les vrais amoureux du vélo.
Pour Jérôme Kus, le Paris-Roubaix Challenge n’est plus une découverte, mais l’envie reste intacte. Chaque année, depuis trois ans, il coche la date avec des amis. Le rituel est bien rodé : dîner la veille, blagues d’avant course et tension qui monte doucement. Et puis, très tôt le matin, les premières pédalées sur les routes du Nord.
« Ce n’est pas qu’une course. C’est aussi un week-end entre amis, un moment à part. On se retrouve, on rigole, et ensuite on plonge ensemble dans l’enfer du Nord. »
Cette année, c’est le parcours de 145 kilomètres : 19 secteurs pavés, dont la mythique Trouée d’Arenberg en guise d’introduction. Un sérieux morceau, mais qui, avec les années, s’aborde différemment, peut-être plus sereinement.
Il faut dire que cette année, la météo est de leur côté : un grand ciel bleu, sec et franc. Un rêve pour qui a déjà connu les pavés détrempés.
"La première fois, je n’étais pas rassuré. Je pensais que j’allais m’exploser les mains, mes pneus, ou les deux. Maintenant, j’y vais avec plus de recul, plus d’expérience… et un vélo Gravel. »
Le matin, il a enfilé son cuissard Émile, son maillot Saint-Étienne, histoire d’avaler les kilomètres sereinement.
Sur la ligne de départ, les nationalités se mêlent autour de lui. Ça parle anglais, espagnol, italien, français. Mais à l’approche d’Arenberg, les voix se taisent. Le peloton glisse dans un silence pesant.
« C’est brutal. Tu te demandes ce que tu fais là. Tu te demandes si tu vas passer. Et puis tu serres les dents, et tu ne lâches rien. »
Et cette année, ça ne passe pas. Crevaison. Pas de panique. Réparer, repartir. Il en a vu d’autres.
De toute façon, sa stratégie est simple : entre les pavés, il gère et sur les pavés, il donne tout. All-in là où ça tape. Et c’est dans ces moments plus calmes, entre deux secousses, qu’il profite d’être à l’abri dans les roues, pour faire connaissance avec d’autres coureurs venus du monde entier pour poser leurs roues sur ces lieux mythiques. Mais malgré ces belles rencontres, dès que les pavés réapparaissent, c’est chacun pour soi.
Vient ensuite le secteur de Mons-en-Pévèle. Technique, mais surtout exigeant car en légère montée.
« Ce secteur me va bien. Il correspond à mes qualités. C’est peut-être l’un de mes préférés. Il a vraiment une ambiance particulière. »
Côté ravitaillements, tout est bien pensé. Rien de trop, mais ce qu’il faut, au bon moment. Pas de spécialités nordistes au menu, mais qu’importe. La bière et les frites viendront plus tard.
Et puis vient le Vélodrome. Le bruit change. La lumière aussi. Tout devient plus rond, plus doux. Il entre, fait le tour, jette un œil vers les tribunes. L’émotion est discrète, mais bien là.
« Tu penses aux images qu’on a vues toute notre vie à la télé. Celles de Boonen, de Cancellara, ou plus récemment Van der Poel. C’est vraiment un lieu chargé d’histoire. Et tu réalises que, même pour quelques secondes, tu passes la même ligne que tous ces grands champions. C’est juste mythique. »
Alors bien sûr, à l’arrivée, la fatigue est là. Mais elle est belle et satisfaisante.
« J’ai eu une blessure qui m’a tenu éloigné du vélo pendant un moment. Alors revenir ici, dans cette ambiance, sur ce parcours… C’était symbolique. Une manière de dire que j’étais de retour. »
Après l’arrivée, le barbecue traditionnel l’attend : saucisses locales, frites croustillantes et une bière fraîche. Puis c’est l’heure d’aller encourager les professionnelles, avant un bon repas dans un restaurant sympa de la région. Le soleil commence à descendre, les jambes sont lourdes mais le cœur un peu plus léger.
Le dimanche, comme un besoin de ne pas tourner la page trop vite, ils repartent rouler un peu autour des secteurs pavés. Pour rester dans l’ambiance. Pour prolonger le plaisir.
Comme un indice que l’histoire n’est pas terminée, qu’il y retournera. Pour les pavés, pour l’ambiance et pour la bière à l’arrivée.
À midi, retour au barbecue. Même formule que la veille, même plaisir simple avant d’encourager les pros, toujours avec le même mélange d’admiration, de passion et de souvenirs encore chauds dans les jambes.
Après ça, trois mots lui restent en tête : « Mythique. Plaisir. Bières. »
Et puis une odeur tenace et joyeuse, qui flotte encore dans sa mémoire : « Celle des frites, évidemment. »
Et après tout, c’est peut-être ça, le plus important.
Merci à Jérôme pour le partage de son expérience.
Texte: Léo Béjoint | Crédits photo: Sportograf.com | lechti.com